mercredi 28 octobre 2015

Lecture: Maisie Dobbs


Au menu du jour, non pas un, mais deux romans, deux tomes des aventures de Maisie Dobbs, de Jacqueline Winspear, découverte grâce à ma conseillère littéraire personnelle, je veux bien sûr parler de Galéa.

J'avais suite à la lecture de ce post commandé le roman à la bibliothèque, et j'ai eu l'excellente surprise de voir arriver les 2 volumes de ses aventures (je ne savais même pas qu'il y en avait un deuxième).


Résumé: Londres, 1929. Maisie Dobbs monte sa propre agence de détective privé. Un métier peu commun pour une jeune femme.
Mais cette fille d’un modeste marchand de quatre saisons n’est pas comme les autres. Placée comme domestique dans une demeure aristocratique de Belgravia, elle réussit à intégrer le prestigieux Girton College  de Cambridge, au prix d’un travail acharné.
Mais, quand survient la Grande Guerre, elle n’hésite pas à endosser l’uniforme d’infirmière, quitte à voir tous ses espoirs disparaître dans le sang et la boue des champs de bataille français.
Sa première affaire la replonge justement dans les années sombres de la guerre et elle va devoir affronter les fantômes qui la hantent depuis plus de dix ans.



Résumé: Londres, 1930. Maisie Dobbs – une jeune détective privée – est contactée par Joseph Waite, un puissant homme d’affaires, dur mais respecté, admiré aussi pour son action en faveur des plus démunis, l’Angleterre se trouvant alors en pleine crise économique. Sa fille, Charlotte, s’est enfuie de la maison mais, par peurdu scandale, Waite ne veut pas faire appel à la police. Au fil de ses recherches, Maisie va être confrontée à trois curieuses affaires de meurtres, qui ne sont pas sans lien avec la disparition de Charlotte puisque les victimes étaient ses amies les plus proches. Une fois encore,Maisie se retrouve plongée dans les horreurs de la Première Guerre mondiale… et dans son propre passé.


J'ai beaucoup aimé cette héroïne d'un nouveau genre, jeune femme d'une intelligence incroyable (elle me fait un peu penser à Sherlock Holmes), qui a su d'élever grâce à cette intelligence et le soutien des gens qui l'entouraient, son père d'abord, ses employeurs ensuite, et qui choisit un métier bien peu féminin, pour l'exercer avec finesse. Elle est le reflet de son époque, l'entre-deux guerres, "vieille fille" de circonstance (si l'on peut dire, puisqu'elle n'a que 30 ans, tout est une question d'époque), comme bien des femmes elle a perdu l'homme qu'elle aimait au front, et à travers elle on passe de la cuisine d'une famille aristocratique (avec toutes les images de Downton Abbey qui remontent immédiatement) à la vie en Angleterre après guerre, en passant par l'université de jeunes filles ou la boue du front en France.

J'ai aimé cette femme qui ose, qui prend son destin en main, mais qui malgré son caractère et sa volonté de fer reste une femme qui a souffert, une femme qui a un passé, et qui doit apprendre, comme ses compatriotes, à elle aussi affronter et vivre avec ce passé. Apprendre à dépasser les anciennes blessures, à apprivoiser la douleur pour ne plus la subir, c'est ce que Maisie et ceux qui l'entourent doivent faire.

Autour de Maisie gravitent des personnages attachants, ceux qui l'ont accompagnés dans son évolution, et ceux qu'elle rencontre au gré de ses aventures, en particulier son mentor Maurice Blanche, qui lui a tout appris, et son assistant, Billy. Jacqueline Winspear recrée là le modèle du duo d'enquêteurs, comme Holmes et Watson, ou Poirot et Hastings, en ajoutant la relation entre le détective et la police qu'on retrouve dans les romans de Conan Doyle, ou dans ceux d'Agatha Christie.

La recette fonctionne, ces deux romans sont faciles et agréables à  lire, bien ficelés malgré des énigmes un peu simples (même moi j'ai réussi à trouver avant la fin...), et si chaque enquête est indépendante de la précédente, on a en fil rouge la vie de Maisie, et la fin du deuxième tome a attisé ma curiosité sur la suite de ses aventures (il y a un peu de romance dans l'air....). J'espère qu'il y aura rapidement des traductions des tomes suivants (appel aux personnes compétentes!!!), je n'aime pas du tout lire en anglais, et j'ai bien envie de découvrir la suite!!!!

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Nouvelle participation pour "A year in England"

mardi 27 octobre 2015

Imitation Game



Pas de lecture pour la chronique du jour, mais un film, sorti en début d'année, mais que je n'ai vu que ce week-end.

Synopsis: 1940 : Alan Turing, mathématicien, cryptologue, est chargé par le gouvernement Britannique de percer le secret de la célèbre machine de cryptage allemande Enigma, réputée inviolable. 


La base du film, c'est bien sûr l'invention de la machine qui décrypta Enigma, mais ce qui en fait la force, ce sont les personnages, et les liens entre eux. Liens sociaux d'abord, que Turing, malgré son génie, ne sait pas nouer avec les autres, et ce dès son plus jeune âge. Il est suprêmement intelligent, mais il est incapable de travailler en équipe, n'hésitant pas à court-circuiter son supérieur hiérarchique pour obtenir ce qu'il veut, ou à renvoyer de façon humiliante les membres de l'équipe qu'il juge insuffisants. Même hors du cadre du travail, il est incapable de s'adapter aux relations sociales, au point que ses amis sont obligés de lui donner des coups de pied pour l'empêcher de ruiner une tentative de flirt d'un de ses collègues.
Liens de pouvoir ensuite, malgré son intelligence, Alan Turing est démuni face au chantage et aux jeux de pouvoir,  ce qui le contraint à des choix difficiles.

Le film s'imprègne aussi des conventions sociales l'époque: la place de la femme dans la société sur le plan professionnel (avec la scène grandiose de l'arrivée de Joan Clarke (Keira Knightley) à l'examen proposé par Turing, et qu'on veut renvoyer à l'étage des secrétaires), et sur le plan personnel (avec l'impossibilité de travailler avec des hommes, et l'exigence du mariage pour vivre loin de chez ses parents); le rejet de l'homosexualité associée à une maladie qu'on traite à coup de médicaments.
Et puis il y a la question de la responsabilité, et des choix à effectuer quand on a le pouvoir de le faire: choisir de sacrifier quelques uns pour sauver le plus grand nombre.

Enfin, l'atout majeur de ce film, c'est Benedict Cumberbatch, l'interprète d'Alan Turing. Je l'avais déjà beaucoup aimé dans son interprétation de Sherlock Holmes, et son interprétation d'Alan Turing m'a convaincue. Il colle parfaitement au personnage, on ressent à travers lui la solitude de son personnage, son incapacité à vivre normalement, en bonne intelligence avec les autres. Il est un génie torturé profondément seul, et pourtant capable de se sacrifier pour protéger ceux à qui il tient, il souffre de sa différence sans pouvoir y remédier. La fin est incroyablement poignante (même si je  ne sais pas si elle reflète la réalité de son histoire), déchéance d'un génie qui refuse d'abandonner la seule chose qui compte pour lui: sa machine.

Au final, un très bon moment de cinéma!

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3ème participation d'octobre à "A year in England"!

samedi 24 octobre 2015

Lecture: Un jour par la forêt


Avec une semaine de retard, parce qu'une formation durant toute une semaine ne m'a pas laissé le temps de me poser, quelques mots sur un livre emprunté par hasard à la bibliothèque - je pense que j'ai au moins été orientée sur l'auteur par un conseil blogguesque, mais je n'arrive pas à retrouver lequel, ça doit être la fatigue de cette semaine!

Résumé: Ce matin-là, Sabine, onze ans, fait l'école buissonnière.
Que fuit-elle vraiment ? Est-ce la perspective d'un rendez-vous fixé entre sa mère, dont elle a honte, et son professeur de français, excédée par son attitude en classe, ou l'idée plus confuse qu'elle n'a pas sa place au lycée ?
Mais au cours de sa journée vagabonde, dans ce Paris qu'elle découvre, bien des choses vont changer. Le hasard d'une rencontre lui révélera le trésor qu'elle porte en elle.


J'ai trouvé ce roman extrêmement touchant. A travers l'histoire de Sabine, il traite de plusieurs sujets qui font réfléchir: le regard qu'un enfant porte sur ses parents, la diversité à l'école et l'égalité des chances, la transmission du savoir par les professeurs, et aussi, et surtout, une invitation à découvrir la poésie.

La mère de Sabine est femme de ménage, "agent technique" comme doit l'écrire Sabine sur les fiches de renseignements au début d'année. Elle élève seule sa fille, elle travaille toute la journée, mais Sabine a honte d'elle. Elle l'aime, mais elle ne veut pas qu'on la voit à l'école, car elle sent bien que sa mère ne correspond pas à ce que connaissent ses professeurs et ses camarades. Le regard de l'autre, le jugement de l'autre, dès notre plus jeune âge, nous y sommes sensibles, et, comme Sabine, cela conditionne nos actes et nos choix.

Sa mère est femme de ménage, et elle a voulu le meilleur pour sa fille, qui n'a pas intégré le collège du quartier, mais le bon collège situé plus loin, parce que Sabine, qui était bonne élève en primaire, est toutes les chances pour elle. La fillette fait donc partie des élèves intégrés pour l'égalité des chances, mais elle est en décalage par rapport aux autres élèves, pas le même environnement, pas la même éducation, et le corps enseignant n'est pas forcément ouvert à accepter ces élèves différents.
J'ai eu l'immense chance de grandir dans une famille privilégiée, où la lecture et la "culture" faisait partie intégrante de mon éducation. Et j'essaye de donner cette chance à mes enfants, de leur faire découvrir la lecture, l'histoire, mais je sais que ce n'est pas donné à tout le monde. Cette égalité des chances est un vrai sujet d'actualité, l'accompagnement des enfants pour les devoirs à la maison (qui sont censés être interdits) est une partie du problème, mais ce n'est pas le seul. Et la souffrance de Sabine générée par ce décalage entre le monde dans lequel elle évolue pendant la journée et celui où elle rentre le soir est poignante. Au point de lui faire détester le mot "culture", et tout ce qu'y peut s'y rapporter.

La culture, le mot clé de la prof de français, celle qui tente d'expliquer la poésie à une classe de 5ème. Et là je suis repartie dans l'enfer des explications de texte, quand il fallait trouver les allitérations et les assonances pour essayer de trouver un sens à ce que l'auteur avait écrit. Où comment rendre totalement inaccessible l'univers de la poésie aux enfants. Je ne dis pas que c'est simple, je ne dis pas que je ferais mieux, et loin de moi l'idée d'émettre ici une critique des professeurs de français en général. Mais Marie Sizun pointe dans le roman la difficulté de cette femme qui doit expliquer un poème de Victor Hugo à sa classe, mais qui ne se met pas au niveau de ses élèves, les enfermant (en particulier Sabine) dans une case. Et elle propose à travers la rencontre de Sabine avec deux profs anglais, une prof de français et un prof de dessin, une autre approche de la poésie et de l'art, en mettant en comparaison les deux. Car Sabine est une artiste, elle est passionnée de dessin, et elle regarde le monde avec un regard de poète, remarquant les couleurs, les impressions, et tout ce qui échappe à notre regard pressé. Sa promenade dans le Bois de Vincennes est magique, on ressent avec elle les émotions qui la traversent.

Ce que vont lui offrir les deux Anglais rencontrés par un heureux hasard, c'est la découverte du même plaisir dans les mots que dans ce qu'elle voit. Ils lui font découvrir que la poésie est une autre forme de dessin, et qu'avec les mots les auteurs nous offrent tout un monde d'émotions et de couleurs.

Les personnages de ce roman sont attachants, extrêmement humains, et ils nous parlent, parce qu'ils sont proches de nous, qu'ils nous rappellent des personnes qu'on a connues, des personnes qu'on a croisées.

Un très beau roman, facile à lire mais qui nous interroge sur des sujets toujours d'actualité, et qui m'a donné envie de me replonger dans les poèmes de Victor Hugo!

dimanche 18 octobre 2015

Lecture: Le sermon sur la chute de Rome

Contrairement au Goncourt des lycéens qui m'a souvent servi de conseil littéraire, et dont je n'ai jamais été déçue, je n'ai que peu lu les Prix Goncourt (même si en balayant la liste j'en ai quand même trouvé quelques uns connus, dont de magnifiques lectures, comme "Le silence des Scorta", ou d'autres plus mitigées, comme "Alabama song", ou alors encore celui, prêté par un collègue, qui attend depuis des années dans ma table de nuit que j'ai le courage de dépasser les premières pages que j'ai lues, je veux parler des "Bienveillantes").
C'est donc avec intérêt que j'ai emprunté le roman de Ferrari pour découvrir un nouvel auteur récompensé par ce prix prestigieux.

Résumé: Dans un village corse perché loin de la côte, le bar local est en train de connaître une mutation profonde sous l’impulsion de ses nouveaux gérants. À la surprise générale, ces deux enfants du pays ont tourné le dos à de prometteuses études de philosophie sur le continent pour, fidèles aux enseignements de Leibniz, transformer un modeste débit de boissons en “meilleur des mondes possibles”. Mais c’est bientôt l’enfer en personne qui s’invite au comptoir, réactivant des blessures très anciennes ou conviant à d’irréversibles profanations des êtres assujettis à des rêves indigents de bonheur, et victimes, à leur insu, de la tragique propension de l’âme humaine à se corrompre.
Entrant, par-delà les siècles, en résonance avec le sermon par lequel saint Augustin tenta, à Hippone, de consoler ses fidèles de la fragilité des royaumes terrestres, Jérôme Ferrari jette, au fil d’une écriture somptueuse d’exigence, une lumière impitoyable sur la malédiction qui condamne les hommes à voir s’effondrer les mondes qu’ils édifient et à accomplir, ici-bas, leur part d’échec en refondant sans trêve, sur le sang ou les larmes, leurs impossibles mythologies.

 C'est en lisant ce genre de romans que je suis confortée dans l'idée que je ne serai jamais une grande critique littéraire. Certes, l'écriture est belle, et on est emporté dans ce monde créé par Ferrari, on sent venir la chute inéluctable bien plus que les protagonistes eux-mêmes, mais je n'ai pas été séduite par le roman en lui-même.

Ce roman nous raconte les vies de plusieurs générations d'une famille corse. Marcel d'abord, le grand-père, celui dont la vie est marquée par les "ratages successifs". Dès les premières pages du livre, on est plongés dans ce qui est le fondement de sa vie: l'absence. Marcel est l'enfant d'après-guerre, petit dernier d'une fratrie de 4 filles et 2 garçons. Dès sa naissance ses parents "s'assirent près de son berceau en posant sur lui un regard plein de nostalgie, comme s'ils l'avaient déjà perdu, et c'est ainsi qu'ils le regardèrent pendant toute son enfance". Enfant avec une mauvaise santé, il se bat pour aller à l'école, pour pouvoir sortir du monde dans lequel il est enfermé. Son service militaire, et son niveau d'études qui doit lui permettre d'être officier, lui semble le sésame pour enfin découvrir cet autre monde, mais la vie en décide autrement avec l'armisitice de 1940, qui met fin avant même son commencement à sa carrière militaire. Et même son engagement dans les forces françaises libres ne lui offre pas la vie qu'il souhaitait, il reste en retrait, et ne verra jamais un combat. Il part ensuite dans les colonies, laissant son frère lui choisir une épouse qui partira avec lui. Il l'aime mais il en a honte, et ne la "sortira" qu'une fois envoyé au fin fond d'une zone isolée. Son malheur le poursuit, malgré sa mauvaise santé, c'est sa femme qui va mourir après la naissance de leur fils, que Marcel va confier à sa soeur, précipitant le malheur de la génération suivante.

La génération suivante, c'est Jacques, qui va épouser sa cousine Claudie, malgré l'opposition de toute la famille, et qui mourra, contre l'ordre des choses, avant son père. Jacques et Claudie ne sont que des personnages secondaires du roman, transmetteurs de la malédiction de Marcel à la génération suivante, et révélateurs de ce qu'il adviendra.

Viennent ensuite Aurélie et Matthieu, les petits-enfants. Aurélie, c'est celle qui a finalement obtenu l'affection de son grand-père, contrairement à son frère qui restera l'objet de la malveillance de son grand-père. Aurélie, c'est le seul personnage vraiment attachant de ce roman. Elle est attachée à sa famille, elle a des valeurs, elle sera soutient de ses parents pendant l'épreuve de la maladie de son père, et elle sera aux côtés de son grand-père jusqu'à la fin. Elle est aussi le "Jimini criquet" de son frère, tentant en vain de le ramener dans le droit chemin de la famille et du travail, mais renonçant devant le refus de son frère de changer, incapable d'assumer sa vie.

Et puis il y a Matthieu, qui a arrêté ses études de philo pour partir tenir un bar dans le village de sa famille avec son ami d'enfance, celui qui se laisse porter par la facilité de la vie, qui s'invente des excuses pour ne pas affronter la réalité, ou pour l'adapter à ce qu'il veut. Il est spectateur, de sa vie et de ce qui l'entoure, au point le laisser son père mourir sans aller lui dire au revoir, de peur de perdre le monde parfait qu'il s'est construit, et d'assister à la destruction de ce monde sans rien dire ni rien faire, "immobile sous la lune". Il profite de ceux qui l'aiment, ses parents, sa soeur, et celle qui deviendra sa femme, qui l'excusent, et lui laissent la possibilité de fuir ses responsabilités, qui sont là quand il appelle à l'aide, quand lui ne le sera jamais pour eux.

Rien n'est lumineux dans ce roman, c'est effectivement une version moderne de la destruction par les hommes des empires qu'ils ont eux-mêmes bâtis, mais il n'y a pas la promesse d'espérance que portait le sermon d'Augustin, celui de la rédemption dans l'Amour de Dieu. Augustin parlait de la destruction par les hommes des empires humains, pour la gloire du Royaume de Dieu, alors que le monde construit par Ferrari se referme sur lui-même, sans espoir d'un avenir meilleur.

Peut-être faut-il être plus sensible à la philosophie que je ne le suis (j'ai eu 8 au bac pour vous situer mon niveau dans la matière) pour apprécier à sa juste valeur le roman de Ferrari, mais pour ma part, même si j'ai lu ce roman avec plaisir, je n'en garderai pas une trace indélébile, n'y voyant que le reflet des travers des hommes, vanité, égoïsme, facilité, mais sans l'espoir qu'en l'homme même si on trouve le pire il y a aussi le meilleur.

mercredi 14 octobre 2015

Lecture: La crique du Français

 Grâce à ma participation au "Mois Anglais", j'ai replongé le nez dans les romans de Daphné du Maurier. J'associais ces romans à des lectures "jeunes", probablement parce que je les ai découverts pendant mon adolescence (quand j'étais jeune et innocente ;-)), mais c'est avec grand plaisir que j'ai lu "L'amour dans l'âme", et ça m'a donné envie d'aller plus loin que les grands classiques de cet auteur.

J'ai donc emprunté "La crique du Français" à la bibliothèque, seul ouvrage disponible que je n'avais pas encore lu.

Résumé: Fuyant les mondanités londoniennes, Dona St. Columb, une jeune lady à la beauté fière et au caractère rebelle, s'est réfugiée au bord de la Manche dans sa résidence de Narvon. Là, elle rencontre l'homme qui saura la séduire : un pirate français du nom de Pierre Blanc. Mais l'impitoyable Lord Rockingham, qui la poursuit de ses assiduités, n'entend pas céder à un pareil rival. La chasse au Français commence, et avec elle un crescendo d'épisodes dramatiques...

Il faut avouer que ce roman avait tout pour me séduire: une jeune femme aventurière, un beau pirate français, le sujet de ce livre a fait remonter mes souvenirs d'enfance, celui de ces vacances en Angleterre avec mes cousines, pendant lesquelles nous nous inventions un roman d'aventure dont nous étions les héroïnes, 3 soeurs orphelines vivant en bord de mer, dont l'aînée (ma grande cousine) était une jeune femme sage et accomplie, raisonnable et responsable, la suivante (moi-même) était un garçon manqué passant sa vie sur un bateau (3 mâts bien sûr, nos aventures se déroulaient à l'époque où les bateaux avaient des gréements et où les mousses grimpaient dans les cordages), éperdument amoureuse du jeune capitaine de ce navire, et enfin la 3ème, plus jeune, rêvant de suivre les traces de sa soeur marin ;-)

Autant vous dire que je n'ai pas eu de mal à comprendre Dona, répondant à l'appel du large et de l'aventure, rêvant d'une vie aux côtés d'un homme libre, loin des conventions de son épôque.

Il y a dans ce roman un côté un peu fleur bleue, un peu "chick litt" (ça fait du bien de temps en temps), mais on a aussi au travers de la vie de Dona une réflexion sur la vie de l'époque, dans un milieu aisé et oisif, en particulier pour les femmes dont les choix peuvent faire ou défaire leurs réputations, et sur les choix que la vie nous impose: Dona n'est pas libre, elle est épouse d'abord (même si son mariage ne semble pas la combler), elle est mère, et ce rôle-là lui tient à coeur, et elle aura à choisir entre ce qu'elle était et ce qu'elle pourrait être. Parce que si on comprend qu'elle tirerait sans hésitation un trait sur son mariage, ses enfants sont un lien qu'il n'est pas si simple de couper.

Même si ce n'est pas pour moi le meilleur de Daphné du Maurier, j'ai lu avec plaisir ce roman qui nous entraîne dans une aventure pleine de rebondissements (pas toujours très vraisemblables, mais très plaisants).

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Nouvelle participation à "A year in England"

mardi 13 octobre 2015

Lecture: Les Anonymes

 
 
Parce que le dernier roman de R.J Ellory proposé dans les matches de la rentrée littéraire de PriceMinister me tentait, et en attendant de savoir si j'aurais la chance de le lire, j'ai découvert à la bibliothèque un autre titre de cet auteur, qui me permet en plus de valider une nouvelle participation à l'année anglaise de Titine, que j'ai un peu négligée ces derniers temps.
 
Résumé: Washington. Quatre meurtres aux modes opératoires identiques. La marque d’un serial killer de toute évidence. Une enquête presque classique donc pour l'inspecteur Miller. Jusqu'au moment où il découvre qu'une des victimes vivait sous une fausse identité. Qui était-elle réellement ? Et ce qui semblait être une affaire banale va conduire Miller jusqu'aux secrets les mieux gardés du gouvernement américain…
 
Ce roman même enquête policière et roman d'espionnage, nous plongeant dans les arcanes des services secrets américains (ou dans ses bas-fonds si on y réfléchit bien).
 
Côté policier, l'enquête est menée par l'inspecteur Miller, un flic cabossé comme je les aime, portant son fardeau au travers de ses enquêtes. Il a été marqué par des attaques portées sur son travail, mais il est animé par la volonté de rendre justice aux victimes, même au point de mettre sa vie en péril...ou de franchir des lignes blanches vers le point de non-retour. Car une enquête qui n'était au départ qu'une chasse au tueur en série se transforme quand la police découvre que les victimes ne sont pas ce qu'elles paraissent être...
 
En parallèle, on plonge dans le monde des services secrets américains, plus précisément de la CIA, du recrutement des jeunes à la réalisation de leurs missions, en passant par leur "endoctrinement". Mais au travers de ce récit, et de la prise de conscience de certains agents, c'est une véritable critique du système qu'Ellory nous livre, un système pour lequel la fin justifie les moyens. Sous prétexte de protéger la nation, ce système lui fournit de quoi se tuer à petit feu, et toute personne se dressant devant ce monstre y laisse sa vie.
 
Ce roman nous parle finalement des choix que l'on fait pour atteindre nos buts, des lignes franchies à petite échelle, comme les "petites" infractions de Miller au règlement, ou à grande échelle, comme dans les choix effectués par ceux qui dans l'ombre dirigent le monde.
Je ne suis pas suffisamment experte en histoire et en géopolitique pour démêler ce qui est réel de ce qui relève de la fiction, mais il est clair que tout est parfaitement vraisemblant (et probablement vrai), et même si nous savons que le monde est dirigé par des pouvoirs qu'on ne voit pas, en particulier pour les intérêts et le profit de quelques uns, ce livre nous en montre un parfait exemple.
 
Mais il nous montre aussi que l'homme n'est pas que mauvais, et que même endoctriné, l'être humain est capable de prendre du recul sur la situation, et d'assumer ses erreurs, quel qu'en soit le prix. Chacun à sa mesure, Miller et Robey font preuve de courage pour faire triompher la vérité et la justice, et j'ai vraiment adhéré à ces deux personnages profondément humains.
 
Un beau pavé, mais une belle lecture, qui ne se contente pas d'être une bonne enquête policière, mais une réflexion sur le fonctionnement de notre monde.
 
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Nouvelle participation à "A year in England"