jeudi 17 juillet 2014

Lecture: En souvenir d'André


Martin Winckler est un auteur dont j'apprécie énormément les romans. Je vous avais parlé de La maladie de Sachs, le premier de ses romans que j'ai lu, celui qui m'a fait plonger tête baissée dans les suivants.

"La Maladie de Sachs" et "Les trois médecins" mettent au coeur du récit Bruno Sachs, médecin généraliste pour qui les patients sont au coeur de son métier. J'avais énormément aimé la relation médecin/patient, à travers les récits des patients et ceux du médecin, je crois que par bien des aspects Bruno Sachs me rappelait mon médecin de famille, celui qui nous auscultait en prenant des nouvelles de la famille, qui a compris mes angoisses et prescrit des examens après le cancer de ma mère, parce qu'il savait que les mots ne suffiraient pas, celui qu'on pouvait appeler le matin avant qu'il parte à son cabinet pour qu'il passe à la maison....

"Le choeur des femmes" était de mon avis plus engagé, pour le droit des femmes à être écoutées et soignées avec respect, pour leur droit à choisir, à être informées.... Mais là encore, c'est la relation patient/médecin qui est au coeur du récit, cette relation qui fait grandir le médecin et soulage les patients. Même si l'histoire est parfois un peu rocambolesque, j'avais dévoré aussi ce roman qu'on voudrait mettre dans les mains de tous les gynécos, voire de tous les médecins, pour qu'ils prennent en compte le patient (et dans ce cas plutôt la patiente) dans sa globalité, et pas seulement comme un cas d'étude. Là encore, comme je l'avais déjà dit, il ne faut pas généraliser, et mettre d'un côté les "gentils généralistes", face aux "méchants spécialistes", mais les approches de soin abordées m'ont beaucoup plu.

Du même auteur, j'avais aussi lu "Mort in vitro", plutôt roman policier qui aborde les thèmes difficiles de la PMA (et je suis bien placée pour comprendre de quoi il parle, je connais au moins une femme qui a vécu une PMA peu tournée vers la patiente - et probablement plus vers l'appât du gain), et des liens entre l'industrie pharmaceutique et la médecine (déjà évoqué dans "Les trois médecins"). Même si il m'avait plu aussi, il m'a moins marqué que les précédents, peut-être parce que moins proche de ce qu'on peut vivre dans nos relations avec nos soignants.

Pour en revenir à mes moutons, le livre dont je voulais vous parler aujourd'hui est "En souvenir d'André", toujours du même Martin Winckler


Quatrième de couverture: "Ça se déroulait toujours de la même manière. Une voix appelait sur mon cellulaire, tard le soir ou tôt le matin. Elle demandait à me rencontrer en tête-à-tête. Et donnait la phrase rituelle : "En souvenir d'André." Je me rendais à l'adresse indiquée et là, je rencontrais un homme, parfois seul, parfois avec une autre personne, de son âge ou plus jeune. On ne faisait pas de présentations. Ils connaissaient mon nom, ils m'avaient donné leur prénom. Lorsque le malade souffrait trop, l'autre personne était là pour m'expliquer. Je l'arrêtais très vite. "Je vais d'abord m'occuper de la douleur."'

Ce roman aborde les sujets des soins palliatifs, de l'accompagnement des malades en fin de vie, et du suicide assisté, au travers du récit d'Emmanuel Zacks, médecin qui a aidé d'autres soignants en fin de vie à mourir, qui les a accompagnés dans cette dernière étape qu'ils ont choisi.

Je ne rentrerai pas ici dans le débat de pour ou contre l'euthanasie, chacun a le droit d'avoir son avis, et le but de ce post n'est pas d'entamer une polémique sur le sujet. Pour moi ce roman met en lumière l'importance de l'écoute et de l'accompagnement des patients en fin de vie, l'importance de soulager leur  douleur, d'apaiser leurs craintes. Il parle aussi bien sûr du droit de ces patients, qui en tant que médecins ou soignants savent d'autant mieux ce qui les attend, de partir avec dignité, ou juste en douceur et sans souffrir, mais il n'y a pas de prosélytisme dans ces lignes, plutôt un appel à réfléchir sur ce sujet si difficile.
Mais ce roman n'est pas qu'un récit autour de la fin de vie, c'est aussi l'histoire d'un homme, Emmanuel, de son lien aux autres, ce lien qu'il tisse en écoutant les malades, en les déchargeant des secrets qui leur pèsent, et ce roman, c'est le secret d'Emmanuel qu'il livre à son tour quand la maladie prend le dessus.

Ce roman, il m'a fallu moins d'une heure pour le lire (ensuite je n'avais plus que les sudoku du journal à faire dans l'avion...), je me suis laissée emporter par ces moments d'humanité, qui ramènent au coeur de ce sujet si difficile la personne en tant que telle, et pas uniquement en tant que "cas" ou "pathologie". Une fois encore l'écoute des soignants et leur empathie pour soulager les patients (et je ne parle pas de les soulager définitivement) est au coeur de ces pages, parce que "quand on n'a plus mal, on peut continuer à vivre" (page 113).

3 commentaires:

  1. Très joli billet ! Merci pour ce partage qui donne envie de se précipiter dans sa librairie !

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  2. Merci Sophie pour ce très gentil commentaire.

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  3. C'est vrai qu'il est beau ton billet, je croyais l'avoir commenté mais ce devait être sur FB, depuis le Bernheim, je me décide à lire ces romans qui parlent de la maladie et de la douleur, alors je note celui-là.

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